
Une tribu se trouvait habiter une goutte d’eau suspendue dans le ciel. Dans ce microcosme le bonheur était complet, la nature proliférait sans peine et à juste titre puisque les saisons n’existaient pas. L’air était doux, le travail de la terre était paisible et les récoltes étaient riches.
Le grand sage veillait en chaque instant à ce que l’équilibre soit préservé. Pour cela, il racontait chaque soir la même histoire à tous les habitants et répétait inlassablement que le feu siégeant au cœur du village devait être le seul et l’unique de ce monde et qu’il ne devait pas être dupliqué ailleurs. C’est à cette condition que l’équilibre et le bonheur de la communauté serait maintenu. Mais il ne donnait pas plus d’explications et cela convenait à tout le monde. Par ailleurs, personne ne se posait la question sur qui maintenait le feu continuellement alors qu’il s’agissait en réalité du sage.
Mais la vie en communauté n’était pas si simple pour certains… Il fallait garder un œil sur tous, se préoccuper de leur état, faire en sorte qu’ils se sentent bien. De plus, le travail était toujours collectif au profit de l’ensemble du village sans qu’il soit possible de s’extraire de ce labeur perpétuel.
Un jeune couple qui s’était formé très récemment trouvait cette vie bien monotone et voulait goûter à la liberté individuelle pour fonder une famille. Un soir que chaque habitants avait regagné sa maison, ils décidèrent de quitter le village avec une torche qu’ils allumèrent pour prendre du feu avec eux. Ils trouvèrent rapidement un endroit calme, verdoyant, propice à la récolte et à l’indépendance rêvée. Ils rassemblèrent des bûches et allumèrent un beau feu près de leur maison.
Mais très vite ils prirent conscience qu’il fallait quelqu’un pour maintenir le feu allumé… Et il fallut faire une croix sur une nuit entière à roucouler dans le lit. Passé cet inconvénient auquel ils prirent l’habitude, ils purent construire la famille tant espérée.
Mais un jour qu’ils sortaient dehors pour travailler la terre, ils s’aperçurent de phénomènes problématiques. Les arbres et leurs feuilles commençaient à jaunir et l’air se faisait de plus en plus sec et aride. Pire, la terre commençait à durcir et les récoltes n’étaient plus aussi abondantes. Ils réfléchirent un instant et se rappelèrent de l’histoire du sage sur le fait qu’il ne fallait pas dupliquer le feu. Alors qu’ils comprenaient à présent les conséquences de leur acte sur le fait qu’il ait trop de chaleur avec deux feux, ils leur fallut accepter de retourner au village rejoindre la communauté. C’était là le prix à payer car ils ne pouvaient vivre sans récolte… Ils prirent soin d’éteindre le feu avant de prendre le départ.
Alors qu’ils arrivaient au village, ils furent surpris de voir combien les habitants étaient devenus tristes. Arrivés au niveau de la maison du vieux sage, ils entrèrent dans sa demeure pour présenter leurs excuses. Le vieux sage avait encore vieillit depuis leur départ, il portait sur lui leur faute et le travail qu’il avait du accomplir pour tenter de maintenir l’équilibre en vain.
Il les regarda pourtant avec tendresse avant de les faire s’assoir. Au grand étonnement du jeune couple, le sage les remercia pour plusieurs choses. Ils avaient pris soin d’éteindre le feu et c’était le plus important. Ensuite, ils avaient donné naissance à un enfant ce qui lui procurait beaucoup de joie. Enfin, ils avaient pris conscience de leur péché et l’avait expié en ayant le courage de se présenter à lui. A présent, tout le monde savait que l’équilibre allait être retrouvé.

Quelques commentaires sur cette histoire :
Dans cette plante, l’élément feu est omniprésent mais elle recherche constamment l’eau pour contrebalancer et trouver son équilibre. On comprend bien pourquoi il ne fallait pas augmenter les sources de feu dans l’histoire ! L’eau et le feu fusionnent ici pour offrir une protection à la communauté. Il s’agit là d’un paradoxe nécessaire pour maintenir l’harmonie globale.
Le chardon-marie nous amène également à dépasser les apparences légères de l’individualité et sa liberté trompeuse. On découvre le sens du collectif qui permet la joie d’être soi au cœur de l’humanité et qui ne saurait reposer sur des actes égoïstes. En effet, il s’agit d’une plante austère propice à développer la morale personnelle mais son caractère intransigeant mène en retour à une grande lucidité sur soi et sur nos actes. Ainsi elle aide à prendre conscience de l’ombre avec bienveillance sans pousser à la culpabilité par le biais de la recherche d’honnêteté qui mène à la lumière.